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    Lundi 16 OCTOBRE 2017 18:00 Médiathèque

     

    ATELIER PHILO Animé par J. Arletaz

    Texte lanceur et compte rendu... suite

    Penser en première personne 16.10.17

    C'est moi qui pense, personne d'autre; je pense, comme je ressens, comme je veux, comme je crains. Il s'agit de mon activité interne, nul ne peut le faire à ma place. Et pourtant! Que d'éléments vont peser qui m'empêchent d'être le véritable sujet de ma parole!

    Mais qu'est ce que penser?

    Sinon une caractéristique humaine comme celle d'utiliser des objets. Les deux sont sans doute liés: pour fabriquer un objet, pour utiliser des outils il faut avoir pensé un projet, il faut se donner des moyens pour atteindre un but.Tout cela suppose la capacité de prendre des décisions, donc de juger. L'activité de jugement qui permet la décision est une manifestation claire de la raison, dont Descartes souligne (Discours de la méthode) qu'elle est présente chez tous les hommes, quelle que soit la vivacité de leur esprit.

    C'est une conquête progressive: à la différence des conduites instinctives, le bébé humain devra peu à peu devenir ce qu'il est. L'éducation est nécessaire à cette humanisation. Le langage joue aussi un rôle important en même temps que les activités motrices et les relations affectives.

    La formation de l'opinion

    Pour plus de clarté distinguons entre deux sens du mot penser: d'une part penser c'est tout ce qui se produit dans notre esprit mais ce sens large du terme ne permet pas de préciser suffisamment l'activité de pensée: penser, c'est former des idées, construire des jugements. C'est ce second sens qui nous intéresse. Or juger, c'est éliminer les affirmations contraires à la position que l'on soutient: penser c'est dire «non» affirme le philosophe Alain.

    Dans le Téétète, Platon décrit le mouvement de la pensée comme un dialogue intérieur que l'âme mène avec elle-même, passant de l'affirmation à la négation, examinant les questions qui se posent à elle jusqu'au moment où son point de vue devient stable et assuré.

    « L'opinion droite » est l'idée qui sans être un savoir, voit juste. Mais l'opinion se forme parfois en court-circuitant ce travail intérieur, et elle est alors préjugé, répétition d'idées entendues de l'extérieur ou première impression non critique. Nous pouvons émettre des opinions qui ne correspondent pas à un véritable travail de pensée et la philosophie est née pour une part décisive de cette nécessité d'une critique de l'opinion et de la recherche de critères qui permettent de distinguer entre les affirmations vraies et les préjugés, ou de trouver des méthodes d'examen des questions controversées.

    La pensée va d'une situation concrète que l'on veut comprendre, à l'examen de ses caractéristiques (détour par l'abstraction) pour revenir à la situation initiale avec les informations et les analyses qui permettent de la comprendre.

    Qu'y a-t-il de vrai dans ce que nous pensons ? A quelles conditions ces outils de pensée que sont les concepts nous permettent-ils d'atteindre la vérité ? Même parmi les personnes considérées comme compétentes, que de désaccords!Les hommes sont-ils capables de vérité ?

    Il faudra donc, pour Descartes, mettre en doute tout ce qui n'est pas absolument certain, à commencer par les témoignages de nos sens qui sont susceptibles d'erreurs. Faut-il alors douter de tout? et suspendre ainsi son jugement pour ne rien affirmer de faux?

    Mais pour Descartes c'est un doute provisoire, afin de trouver une fois dans sa vie s'il est une vérité qui résistera au doute, et qui sera absolument assurée. Descartes y parvient, par cette affirmation que l'on nomme le cogito cartésien (du verbe latin cogito, je pense) : «je pense donc je suis».

    En effet, même si mes pensées sont fausses, je ne peux douter que je pense: c'est une vérité première et c'est à partir de cette vérité que toutes les autres certitudes pourront s'établir. Les pensées des autres, notamment celles de nos parents et de notre entourage, nous ont imprégnés avant que nous ne puissions nous en rendre compte. Nous avons des «idées» bien avant d'avoir«l'usage de notre propre raison».

    On me pense

    De plus n'est-il pas plus confortable de se laisser porter par des idées spontanées, dominantes et finalement toutes faites ? plutôt que de vérifier la valeur de ses propres pensées, et d'avoir à les défendre vis à vis de ses proches.

    On pense ainsi pour nous...Heidegger a montré la force de cette emprise du «on» qui fait que notre pensée n'est pas pensée, que notre vie est inauthentique et selon Jean Paul Sartre, souvent nous nous mentons à nous mêmes, grâce à d'étonnantes capacités de «mauvaise foi».

    Penser par soi-même

    Toutes nos pensées personnelles ne seront pas forcément des nouveautés. Hegel précise ainsi que la philosophie elle aussi s'apprend et qu'un individu ne peut inventer du neuf que dans la mesure où il s'est approprié les connaissances et les débats qui l'ont précédé.

    Penser par soi-même ne suppose donc pas de se retrouver seul sur une île déserte sans personne qui vous influence, mais plutôt tracer son chemin et garder le goût de connaître et de comprendre au sein de la culture commune, par une démarche critique et une volonté de cohérence entre sa pensée et ses actes, ses expériences et ses idées. Car il est aussi un plaisir de penser.

    Volages, instables, tourbillonnantes, invasives...les pensées intérieures mènent leur danse, souvent à notre insu.

    Du bon usage du dialogue

    Le dialogue ne vise pas à vaincre l'autre par l'aisance ou la force de ses arguments, mais à chercher ensemble à mieux comprendre le problème. Dans le dialogue, chacun des interlocuteurs est intéressé d'abord par l'objet de la discussion: il faut même prendre plaisir à être réfuté(Socrate) si cela fait avancer la compréhension de chacun- même lorsque le désaccord persiste.

    Savez-vous combien de séquences de pensée défilent du matin au soir dans nos têtes ? Ce « courant de conscience » d'après William James a été chiffré par les psychologues à un total de 4000 par jour.

    ….Qu'en pensez-vous ?

    J.A

     

    Le compte rendu